Pas très doux avec les proches des révolutionnaires. C’est un euphémisme. Et tu te demandes ce qui se serait passé si tu n’avais pas été une soldate aussi fidèle à l’Empire toutes ces années, si tu n’avais pas prouvé ta loyauté à mainte et mainte reprises. T’auraient-ils enfermée ? T’auraient-ils considéré comme alliée à celui que tu venais de jeter dans la gueule du loup ? Tu n’en sais rien et tu préfères ne pas trop y penser, sachant tout de même que c’est sûrement ta position dans les rangs de l’armée impériale et ta dévotion évidente qui t’ont permi d’à peu près bien t’en sortir.

Oh, pas sans casse, tu le sais.
Ta vie ne ressemble plus à grand chose, depuis.

Tu ne sais plus ce que tu veux. Ce que tu fais. Ta promotion t’a été enlevée, les doutes persistent et tu sens que tes affectations ont quelque chose de presque personnel. Il n’y a bien que Paz pour être seule constante dans ta vie, celle à qui tu te raccroches désespérément en fermant les yeux, espérant ne pas te tromper alors que tout semble t’indiquer le contraire. Tu ne veux pas y croire, ne pas y penser, car tu ne saurais pas comment réagir si tes doutes devenaient réalité.

Tu as sacrifié ton père pour un Empire en lequel tu croyais.
Y sacrifierais-tu Paz ?

En serais-tu seulement capable ?

- Je ne sais pas. Non aurait été la réponse logique. Tu ne sais pas, celle honnête. Tu détournes un peu le regard, observant l’horizon sans trop y porter attention, la nervosité montant doucement. Devrais-tu dire de telles choses devant une sénatrice ? Tu n’en sais trop rien. Au point où t’en es ? Tu ne t’en soucies même pas. Parce qu’il y a ces questions qui tournent dans ton esprit, ces remises en question. Et celle, plus importante. Y sacrifierais-tu Paz ? Une question à laquelle tu n’as pas de réponse. À laquelle tu n’as qu’une autre question. Est-ce que tu te sacrifierais pour elle ? - C’est compliqué. Tu soupirs. - Et à quelque part, je lui en veux. Pas tant pour ses opinions et sa position mais plutôt… Il l’a fait en sachant que ça me mettrait en danger ? C’est ça le problème, finalement. Ce n’est pas l’Empire qu’il a trahi.

C’est toi.

- Puis il a jamais cherché à m’en parler ? Il n’a jamais voulu parler de la situation de Callero, n’a jamais abordé le sujet. Sauf un beau jour où je lui ai annoncé que j’étais considérée pour une promotion. Celle que tu n’as pas eu, ce rang de lieutenant que tu ne sais même pas si tu auras un jour. - Il s’est énervé, j’ai essayé de discuter, et c’est là que c’est tombé. Au pire moment, donc. Et tu n’as pas su quoi faire. - Je suis partie. Trois jours. Tu as mis trois jours avant de te décider de sortir de chez toi. Avant d’aller rencontrer ton major. Trois jours plongés dans le noir, à considérer tes options.

- En vrai ? Tu laisses entendre un rire nerveux. - Je sais même pas si je l’ai dénoncé pour le bien de l’Empire ou pour me venger. Te venger des mensonges. De tout ce qu’il t’a caché. De ses convictions qu’il ne t’a pas partagé mais qu’il a tenté de forcer dès lors qu’il a senti que ça ne serait plus possible. Il ne t’en a pas parlé à toi, sa fille. Celle à qui il n’a jamais rien dit. En a-t-il parlé à Paz ? Pourquoi à elle ?

Pourquoi n’a-t-il pas essayé de t’apprendre ?
De te faire comprendre ?