Arsène était inquiet. Définitivement inquiet. S'il n'avait pas revu son vieil ami depuis plusieurs années, il pouvait clairement lire la détresse et la douleur dans son regard. Il n'était pas venu à l'esprit du brun que cette réaction était dûe à sa question, dans l'instant. Alors il se contentait d'attendre, pris dans l'appréhension et le doute. Qu'avait-il bien pu arriver à son frère d'arme?

Parce qu'il se sentait encore un tant soit peu en confiance avec le brun, qui l'avait pourtant abandonné quatre ans auparavant, ou parce qu'il était simplement trop fatigué de souffrir en silence, William reprit la parole. Contait à Arsène ce qu'il avait vécu, le soir d'Halloween. L'attaque sur la base de Carteia. Il en avait entendu parler par son père. Mais entendre le blond en parler, même s'il ne s'attardait pas à corroborer les détails, rendait l'histoire viscéralement plus vraie, et terrifiante encore. Beaucoup trop pour que la situation soit confortable. Beaucoup trop pour ne pas se sentir impuissant. Si le prince lui-même avait peiner à contenir la menace, comment de simples civils pouvaient être en sécurité? Et surtout, c'était une pensée égoïste, mais s'il avait perdu son ami avant de pouvoir le revoir, Arsène ne se le serait jamais pardonné.

Il s'était approché de l'homme, maintenant assis sur la roche froide de la grotte. Le brun s'était accroupi pour l'écouter, le soutenir par sa présence, ne voulant le forcer dans une nouvelle étreinte mais étant prête à la lui offrir si d'aventure il en ressentait le besoin. Néanmoins, il comprit rapidement que ce geste ne suffirait en rien à l'apaiser. Le soldat n'avait eu besoin que de mentionner quelques détails. Son cadeau d'anniversaire. Sa passion pour les fossiles. Les yeux clairs d'Arsène s'assombrissaient.

— Will...

Évidemment, qu'il s'en souvenait. Évidemment, qu'il savait de qui il était question. L'admettre, en revanche, lui était impossible. Il se trompait, il se trompait forcément. C'était ce qu'il pensait, sans bien évidemment oser le lui dire à haute-voix. Eddie ne pouvait pas avoir disparu. Il n'avait pas le droit de parler de lui au passé. Secoué par la nouvelle, Arsène avait eu besoin de poser un genou à terre pour ne pas perdre l'équilibre. Et, en voyant les larmes emplir les yeux de son frère d'arme, alors qu'il racontait les circonstances de sa mort, il lui offrait une nouvelle étreinte. Il en profitait pour glisser l'une de ses mains décharnées derrière son crâne, pour le dissuader de le frapper à nouveau contre la roche.

— Je suis désolé, mon frère. Tellement désolé.

Il ne trouvait pas les mots. Aucun n'était adéquat. Alors il se contentait de laisser William extérioriser sa peine. Reichenbach, en bon pokémon d'assistance, s'était faufilé auprès du duo pour se poser sur les jambes de Will. De tout son corps, l'absol faisait pression, autant que possible, sur sa cage thoracique pour l'aider à se calmer. Quant à Elm, elle s'était approchée les oreilles basses, éclairant la scène d'une lumière qui se voulait chaleureuse et rassurante.