Escortée par une poignée de domestiques dès son arrivée annoncée, Noemi traversa le domaine Rosethorn jusqu’à arriver dans une pièce richement décorée dans laquelle on lui fit signe d’attendre. Elle s’installa puis scruta les tableaux ornant les murs, notant qu’ils dépeignaient tous des scènes où humains et Pokémons travaillaient ensemble. Elle n’avait pas fini de les observer lorsqu’une nouvelle domestique – probablement Cyrène – arriva en compagnie d’une Gardevoir. Les deux s’inclinèrent devant elle, chose à laquelle la professeure répondit par une inflexion légère. Les règles de la noblesse maestonienne lui échappaient encore car elle n’avait que peu l’occasion de la côtoyer, donc elle espérait que cela conviendrait et suffirait à transmettre sa politesse.

« Bonjour Cyrène et merci pour votre accueil. » lui répondit-elle avant de se tourner vers la Gardevoir de hocher la tête. Un instant de réflexion plus tard, elle ajoute « Du café s’il-vous-plaît. »

Une fois servie, la professeure se saisit de la tasse mais écouta Cyrène lui présenter la vision des Pokémons qui prévalait au sein de la famille Rosethorn – ou tout du moins celle qu’ils souhaitaient montrer, ce qui voulait sans doute dire que c’était celle en laquelle il croyait vu que la coexistence entre humains et Pokémons n’était pas vraiment à la mode au sein de l’Empire. Autant dire que se présenter en faveur de celle-ci revenait plus à risquer son image publique qu’à convaincre les citoyens et les autres membres de la noblesse.

« C’est assez rare pour être souligné. Je suis d’accord avec vous, mais beaucoup de gens pensent encore autrement, parfois par peur. Après tout, ils peuvent parfois être dangereux, surtout si on ne sait pas comment les aborder. »

Le danger que représentent les Pokémons était d’ailleurs un sujet d’actualité. Après les actes terroristes menés par l’armée révolutionnaire de Callero, la confiance des habitants de Maeston envers leurs Pokémons – ou pire, ceux des autres – était ébranlée. La vision des Pokémons comme des armes ou des outils – née d’un intérêt souvent pragmatique – n’aidait pas les choses. Même si peu pouvaient nier que ces derniers n’étaient pas que des armes, puisqu’ils avaient des besoins et qu’il n’était pas rare que des liens affectifs finissent par se former, la peur était un agent parfois puissant. Surtout s’il était peut-être aussi cultivé par le régime.

« Eh bien dans ce cas, je propose que nous commencions. N’hésitez pas à interrompre l’entretien et à vous déplacer pour illustrer si vous trouvez cela nécessaire. » suggéra Noemi en souriant. Cela faisait partie du protocole qu’ils appliquaient : laisser aux gens l’opportunité de s’exprimer comme ils le souhaitaient et de ne pas les brider dans leurs réponses. S’ils souhaitaient rester courts et évasifs, c’était possible. Et si jamais ils souhaitaient se montrer expansifs, ce n’était certainement pas Noemi qui allait les en décourager. Elle bu une gorgée de café avant de poursuivre.

« Je vais tout de même préciser un peu la procédure. » annonça-t-elle d’une voix calme et sur un ton assez professoral – répétant des mots, des concepts qu’elle avait déjà maintes fois répétés. « Je vais commencer par poser des questions très générales. N’hésitez pas à répondre comme vous le souhaitez. Il n’y a pas de mauvaise réponse et je suis là pour vous écouter et m’adapter à vos contraintes. Ensuite, je poserai des questions plus spécifiques et plus orientées en rebondissant sur vos réponses. Ce n’est encore jamais arrivé, mais si par hasard cela vous met mal-à-l’aise, vous n’êtes bien évidemment pas tenue de répondre. »

La professeure sourit à nouveau après avoir éclairci ces éléments, regardant Cyrène et la Gardevoir pour vérifier qu’ils avaient bien compris. Elle n’avait jamais été confronté à des problèmes lors des entretiens qu’elle avait menés, mais Noemi savait que c’étaient des choses auxquels d’autres collègues – et parfois ses propres étudiants – avaient été confrontés.

« Dans un premier temps, je vous propose de me parler un peu des Pokémons du manoir pour poser le cadre. » Elle jette un coup d’œil sur les grilles d’entretien préparées et en sort les quelques questions introductives. « Est-ce que beaucoup de Pokémons travaillent pour les Rosethorn ? Est-ce que vous travaillez avec une diversité d’espèces ? Y-a-t-il des Pokémons ou des espèces de Pokémons que vous considérez comme emblématiques de la famille Rosethorn ? »