CW : dépression, mention/allusion suicide

Vraiment pas et pourtant c’est l’impression que ça donne; pas qu’il s’en offense, pas que les mots qui ont traversé ses lèvres abîmées aient une connotation autre que la monotonie qu’on lui connaît. Il aurait pu dire que le ciel se couvre et c’aurait fait pareil, c’était simplement factuel. Sauf qu’Alexis ne l'interprète pas de cette façon et ça se voit à son langage corporel, ça se voit à la façon que ses épaules s'affaissent et que ses mains s’élancent vers lui. À son regard, on dirait que c’est elle qui vient d’apprendre la mort d’un proche, d’un parent alors que le sien est d’une impassibilité qui fait questionner. Qui fait se demander si c’est normal de ne rien ressentir pour un fantôme qui ne hante que les contes d’Alexis, mais ça, ce sont des choses auxquels il n’aime pas penser sur le moment; ce sont des choses pour plus tard, pour quand vient dépassé minuit. Ça pince quand elle raconte cette histoire pour la énième fois, sa main s’enroule autour de son poignet et l’en déloge, pensant qu’ainsi, peut-être que ses yeux de biche perdraient en intensité, mais non; elle le regarde atterrée.

« C’aurait pu, » il souffle avec la conviction d’un château de cartes sur le point de s’effondrer. « Je t’en aurais pas voulu. » Parce qu’au fond, c’est plus facile à accepter; plus facile à accepter qu’elle a forcé et qu’elle est restée parce qu’elle voit plus loin de ce que lui voit. Ses yeux se posent sur ses mains qui l’aggripent de toutes ses forces et il ne peut s’empêcher que c’est une énergie mal placée. Blair n’a le temps que de soupirer une nouvelle fois avant que ce qu’il voulait éviter arrive; elle remarque et s’efforce d’en découvrir plus. Il la laisse faire, ne prend pas la peine d’essayer de l’en empêcher car elle a vu et il a pas la foi de tenter de la gaslight. Elle s’assied après l’avoir exposé; maintenant que c’est fait, il n’y a plus de point à garder la veste, alors il la retire, se passe une main sur la zone sensible, douloureuse et il jure presque sentir la chaleur de ses mains qui l'entourent. « C’est pas ce que tu crois, » il dit, sentant les battements du cœur de la brune s’affoler. L’étreinte dure un instant avant qu’il ne la repousse gentiment, car ils sentent sur leur peau dénudée le début d’une averse. « Tu n’es pas chiante… » en tout cas, pas tout le temps, il pense avant de se lever pour l’aider à ramasser la nappe, puis ce qu’il reste des déchets.

Pendant qu’ils s’y affairent, le temps se gâte, la bruine devient une averse et il n’y a pas d’autre option que de courir pour prendre abri sous l’un des bâtiments avoisinant. C’est la devanture d’un café qui sert de parapluie de fortune, il a la nappe, le matériel et sous le bras, sa veste; il croit qu’elle s’est occupée de son pokémon. « Tu sais que j’ai promis, » solennel et un peu ennuyé. « Alors non, c’est pas ce que tu penses. » Il observe avec attention le ciel pleurer à grosses larmes, les gouttes s’écrasent avec violence sur le pavé. Devant eux, les gens courent, ils se bousculent pour se protéger. « Je sais que tu es là, que tu as envie que je te parle… » Et c’est pas ça le problème, il l’apprécie, mais ce n'est pas nécessaire. « Mais j’en ai pas envie, c’est des choses que je préfère garder pour moi. » Parce que c’est lourd, déprimant. « J’ai pas besoin d’aide et en réalité, la dernière chose dont j’ai besoin c’est que tu sois en suicide watch. » Il se laisse glisser jusqu’à ce qu’il se trouve assis. La pluie ne montre aucun signe à vouloir diminuer. « En quoi mourir pour ses convictions est différent d’un suicide? »