Chose promise, chose due. Du moins, c’est ainsi que tu vois l’affaire. Cela fait quelque temps maintenant, que tu n’as plus donné de signe de vie à la sénatrice Valentine, pas qu’elle ait eu de geste en ta direction. Ça ne te chagrine pas plus que ça, mais tu te souviens très bien avoir accepté son invitation à te faire découvrir Nepthe et ses environs, comme de ta surenchère de lui ramener quelques produits de ta confection. L’inaptitude de Mino en cuisine et sa curiosité sur la qualité du service au palais t’auront poussé à faire quelques entorses à ta proposition initiale.
Après t’être assurée de la disponibilité de la jeune femme, tu commences à organiser ta venue. Réserver un taxi Corvaillus ne te prend pas bien longtemps, c’est la suite qui t’accapare le plus. Tu sollicites l’un des pâtissiers du palais, qui te tient en bonne estime, pour la préparation de quelques douceurs. Si tu sais reconnaître certains de tes talents de cuisinière, c’est une discipline bien à part et tu refuses que Mino manque ça. Tu t’attelles dans ton coin à la réalisation de club-sandwich en série, avocat - saumon, bacon – œuf, poêlée méditerranéenne, ... Tu offres un éventail large de choix, convenant à tout type de régime alimentaire, veillant à varier les natures de pain, de sorte à ce qu’au moins un combo tire le gros lot auprès de la sénatrice.
Satisfaite du résultat final, non sans quelques ratés, perfectionnisme oblige, tu arranges le tout dans un panier à pique-nique en osier. Admettant que le snack, au mieux tiède, que tu proposes ne sera pas nécessairement adapté au climat de Nepthe, tu décides de concocter deux thermos. Un premier de chocolat chaud, auquel tu appliques un soin tout particulier, prévoyant même un peu de cannelle, pour celle qui en souhaiterait. Et un second de thé, que tu pourrais bien faire les yeux fermés, tu choisis un Quingshan White Cui Min, un thé blanc délicat. Fin prête, tu quittes Castra Nicia, non sans emporter dans tes bagages une dernière attention, une bouteille d’un grand cru des caves du palais. Pas le millésime le plus recherché, mais un bon vin dont tu n’aies pas à rougir.
Les choses se calment un peu, des dossiers plus sympathiques ressortent. À vrai dire, tu avais presque oublié ceci, donc c'est une surprise, mais une qui est plus que bienvenue. Ça te permettra de prendre une petite pause - même si une visite d'une personne du palais reste stressante - entre deux activités plus fatigantes. De toute manière, tout le monde sait que tu vas allier l'agréable à l'utile.
"Ravis de vous revoir Dvora."
Ça n'est pas feint. Surtout que tu es toujours heureuse de faire visiter ta ville. Elle n'est peut-être pas prestigieuse (et en super bon état selon les endroits), mais c'est la tienne et tu en es fière.
"Je ne mérite pas autant de cadeaux."
Mais c'est très sympathique de sa part. Tu ne vas pas te plaindre. C'est presque stressant, mais tu vas faire un effort pour ne pas imaginer des choses impossibles.
"J'espère que le palais est un peu plus calme."
Palais que tu vas bientôt visiter, et pas uniquement pour le sénat. Mais tu introduiras le sujet plus tard, chaque chose en son temps.
"Souhaitez-vous voir une chose précise ?"
C'est elle l'invitée après tout. C'est elle qui décide.
À peine le temps de composer un dernier message sur ton téléphone, que le Corvaillius entame sa descente. Mino est bien là, à l’heure au rendez-vous. « Plaisir partagé. » Lui réponds-tu amicalement.
Tu décides de laisser tomber un peu de ta retenue habituelle, après tout, ça n’est pas tous les jours que tu peux te targuer de visiter une connaissance sur ces terres. Le panier en osier, chargé de vivres, fait son petit effet. Pas peu fière de t’être attelé à la tâche, tu précises la provenance de chacun des mets, de sorte à ne pas t’accaparer les lauriers d’un autre. De plus, tu tâches de rassurer la sénatrice sur le bien-fondé du choix de te présenter les bras chargés, une délicieuse compagnie n’étant pas pleinement appréciée le ventre vide. Tu finis par ajouter :
« Vous comprenez, je n’avais pas le cœur à vous privez des petits déciles du palais. » Que tu ponctues d’un rire de connivence. L’interrogation suivante de Mino te stoppe tout net. Tu n’as, fort heureusement, pas le temps de statuer sur une réponse qu’elle enchaîne avec le sujet principal du jour, la visite en bonne et due forme de Nepthe. « J’avoue ne pas y avoir réfléchi… Si vous me montriez votre endroit préféré ? Qu’il s’agisse d’une bâtisse en ville ou d’un point spécifique aux environs, je suis preneuse ! »
Un sourire vient dérider les dernières pensées qui obscurcissaient ton visage, les travaux de la salle de réception du palais sont en bonne marche, parait-il. Mais tu préfères ne pas t’aventurer dans cette aile dorénavant, aussi, tu n’en sais guère plus. Te préférant le cœur à la fête, tu te plais davantage à te concentrer sur l’instant présent, plutôt qu’à ressasser les tristes événements qui siègent désormais derrière vous. « Qu’est-ce que vous en dites ? Un bel endroit où pique-niquer par exemple, c’est que l’heure ne va pas tarder à s’y prêter. » Décidément ravie de ta décision de le confectionner en grande partie par toi-même, tu ne sais pas t’arrêter de rayonner avec satisfaction.
Pour ce qui est du reste, tu ne t’attends pas à grand-chose de plus de cette rencontre, que sa prémisse, une après-midi détente pour découvrir une des plus modestes villes de l’Empire, rien de plus.
Le panier est définitivement - et certainement volontairement - vintage. Venu d'un autre âge, comme si vous sortez d'un conte. À choisir, tu préfères qu'elle ai le rôle de l'hypothétique princesse. Ces réflexions puériles à part, tu notes son attention pour les détails. À croire qu'elle est une servante impériale et que c'est son métier. Tu respectes énormément ceci. Et tu saisis le message très indirect : mentionner le palais n'est pas une bonne idée. Du moins, pas tout de suite.
"J'ai hâte de les déguster."
Surtout que tu es un cauchemar en cuisine. Mais elle le sait déjà.
"Excellente idée pour le pique-nique. Si marcher ne vous dérange pas, je peux vous montrer un endroit sympathique. Je dirai une bonne vingtaine de minutes."
De quoi ouvrir l'appétit. Tu es sportive, tu marches beaucoup, tu peux presque dire que tu connais la montagne comme ta poche. C'est faux, mais tu la connais très bien tout de même. Mais c'est une petite marche tranquille pour prendre un peu de hauteur.
"Ceci vous permettra d'avoir une vue de la ville d'un peu plus haut et de profiter de la nature."
Vous serez à la limite. Les grandes villes comme la capitale, tu supportes, mais ça n'est pas toujours le plus agréable. Tu l'invites donc à te suivre.
"Avez-vous souvent eu l'occasion de venir ici ?"
Un "non" ne t'étonnera pas et ne te vexera pas non plus. Elle ne sait pas ce qu'elle manque, tout simplement.
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