La réponse du Monorpale ne se fit pas attendre. Son œil se teinta de tristesse d’un coup. Loin d’être aussi intimidante qu’elle n’avait pu l’être au premier abord, l’épée s’abaissa à hauteur de Chrysanthème. La Ptiravi fut légèrement rassurée de voir que le Pokémon spectre n’était pas hostile. Son regard vide attira bien vite sa sympathie. Elle piailla en direction du Monorpale, soucieuse des problèmes qui semblaient l’accabler.
Dans la lueur de son œil unique, elle crut reconnaître quelque chose qu’elle avait déjà vu. Une sorte d’abysse sans fond, une chose qu’elle ne voyait certes que rarement, mais qu’elle savait identifier au premier regard. L’absence d’une raison d’être. La vacuité de l’existence.
L’épée était émoussée, peut-être même parcourue de légères fissures, abîmée par le temps, rouillée et incapable même de se planter dans le sol tant son acier avait perdu de sa superbe. Chrysanthème afficha un air inquiet en se rendant compte des blessures du Monorpale, ne pouvant s’empêcher de se demander ce qui avait bien pu lui arriver. Mais en bonne petite infirmière, la Ptiravi se mit immédiatement au travail en constatant l’état du Pokémon sauvage. D’abord, elle libéra un Aromathérapie afin d’apaiser. Puis, de sa poche, elle sortit l’œuf doré, qu’elle ouvrit en deux, et en tendit la moitié au Monorpale. Bien que celui-ci ne puisse en manger le contenu, la simple application sur la lame colmata les fissures dans l’acier froid, et l’épée ferma l’œil en signe de reconnaissance.
Chrysanthème était habituée aux malades et aux blessés. Elle était habituée aux gens et aux Pokémon perdus également. Elle gazouilla joyeusement pour rassurer l’épée. Cette dernière se remit à flotter au-dessus du sol, requinquée, et tenta de frapper la pierre. Malheureusement, la lame était toujours émoussée, et aurait besoin d’un bon aiguisage pour être de nouveau utilisable. Déçu, le Monorpale retourna au sol.
Un rêve brisé après l’autre, pas à pas. A chaque amélioration, à chaque avancée, cela devenait de plus en plus difficile. Un pas en avant, pour deux pas en arrière. Chrysanthème resta silencieuse. Elle jeta un œil en direction de son dresseur, qui déposait toujours les fleurs sur les tombes. Un pas en avant, pour deux pas en arrière. L’expression de son visage s’assombrit.
Ce n’était pas qu’il ne voulait pas avancer.
Mais la seule issue vers laquelle avancer, pour lui, était la mort.
Remarquant ce contraste, ou plutôt cette similitude frappante entre l’épée spectrale et l’humain dont le repos éternel approchait, Chrysanthème prit finalement une décision. Attrapant le « bras » en tissu du Monorpale dans sa petite patte, la Ptiravi entraîna le Pokémon sauvage vers Gento, qui remarqua du coin de l’œil l’empressement de son propre Pokémon. Il se tourna vers Chrysanthème qu’il avait jusque-là ignorée. «
Qu’est-ce qui ne va pas, ma puce ? » Chrysanthème se mit à piailler de toutes ses forces, désignant le Monorpale. Gento fronça les sourcils, ne comprenant pas réellement les griefs de la Ptiravi, mais en plissant les yeux, finit par remarquer la lame émoussée du spectre. Pour un Pokémon pareil, cela valait autant que d’être blessé. L’homme soupira doucement. Il commençait à s’habituer à récupérer des Pokémon sauvages un peu partout, comme si ces derniers étaient attirés par lui. Heureusement pour le Monorpale, Gento avait récemment fait la connaissance d’un Scalpion, un Pokémon pour lequel l’entretien de ses lames était également très important. Il avait suffisamment de matériel à la maison pour s’occuper de son cas.
Gento tendit le bras à l’épée, sans avoir peur la moindre seconde. Cette dernière vint se loger dans sa main, enroulant son « bras » autour du poignet du diplomate. Ni le Pokémon, ni l’humain n’étaient effrayés l’un par l’autre.
Gento n’avait pas peur que le Pokémon le dévore, car il n’avait pas assez de vie en lui pour le mourir.
Et le Monorpale ne craignait pas cet humain qui n’avait pas assez de vie en lui pour le blesser.
«
Rentrons », décida le diplomate. Chrysanthème s’accrocha à sa jambe tellement fort qu’on aurait presque pu croire que leur séparation avait été éternelle, alors qu’en réalité, la Ptiravi n’avait erré que quelques minutes seules. «
Ma puce… souffla Gento, sans réellement comprendre les émotions qui traversaient son Pokémon,
rentrons à la maison, d’accord ? »
Et Chrysanthème gazouilla d’un air joyeux en signe d’approbation.
Un pas en avant…
MESSAGE HORS RP> Fin de la capture, merci