la mention de l’ego arrache un sourire amusé aux lèvres d’irène
dont la rougeur n’enviait rien à la framboise sacrifiée aux mondanités dans ce martini
qui n’en avait pas fini d’étaler sa volupté bien pleine.

elle lui reconnaissait là une lucidité que peu possédait ; quincy savait lire les lignes sociales
mais avait aussi une conscience aiguë de son propre statut et de ses propres désirs qu’il était agréable et rafraîchissant de rencontrer ;
ainsi, laisser ce ballet de pouvoir un peu indolent syncoper entre elleux n’était qu’avantageux pour se distraire et s’amuser.

le regard d’améthyste caresse les fossettes malicieuses qui creusent les joues soyeuses de ce faux ami ;
elle lui attribuait volontiers ce statut qui s’élevait bien au-delà du collier bien forgé qui scintillait d’une insolence aussi perçante que l’exhibitionnisme de vanité dont il faisait preuve ici.

créer est une chose, l’orchestrer est bien plus satisfaisant.

car irène avait la certitude absolue de faire fleurir le désir rien qu’avec son dédain ;
ce n’était pas une denrée rare et son ennui se nourrissait surtout du contrôle qu’elle savait retirer de ces coeurs malsains.

mais le sujet véritable ne se trouvait effectivement pas dans leur vision de l’ego ;
irène comme quincy le savait et derrière leurs sourires qui n’avaient rien de vraiment sincèrement chaleureux,
iels s’étaient déjà cerné.e.s en ces courtes rencontres ;
comme iels comprenaient le sens de l’un.e et de l’autre sans vouloir pour autant poser les pieds dans l’univers de cet étrange personnification de ce qu’aurait pu être l’inversion d’un certain soi.

et c’est dans les pupilles pétillantes de ce singulier invité qu’irène trouve le chemin
une suite pavée avec dextérité par ses paroles précédentes car il n’avait rien de canin ;
la sinuosité des doigts qui viennent emprisonner son menton suinte d’un agréable venin.

et en cela, irène ne s’en dégage pas ;


alors ! s’il voulait ainsi caresser le laiteux de cette peau qu’elle aurait pu qualifier de divine,
elle lui offrait volontiers la suite de la visite.

ponctuant ses paroles d’un geste élégant, sa main libre se pose sur la sienne qui réclamait ainsi son attention
et la guide doucement le long de son cou

je préfère les serrer plutôt que les porter ;

la descente n’avait rien d’infernale,
irène aurait pu même se vanter d’en faire un voyage agréable.

puis il serait dommage de gâcher un si beau décolleté.

le chemin s’achève sur une cadence mesurée ; il y avait une lenteur certaine
une langueur de toutes pièces fabriquée,
tandis qu’iels descendent, main dans la main, entre la clavicule à la naissance de son atours dont elle venait de faire une fierté

et elle
avec pour seule bataille un étrange honneur
qui se mesurait avec un étrange curseur.

la tension du parcours s’électrise dans les plongées qu’effectuent leur regard ;
il se maintient.

si elle n’a effectivement rien de charnel, c’était bien plus un défi, un jugement
une manière de jauger cet ennemi dont elle était complice depuis le moment
où il s’était invité les deux verres à la main et qu’elle lui avait répondu sans détour.

irène ajoute à cette réponse un sourire faussement désolé ;
son air contrit dégage la même odeur que la putréfaction d’une hypocrisie mal cachée.

mais êtes-vous donc venu ici avec pour simple objectif de défier l’hôtesse de ces festivités ?

si elle laisse bien la main de quincy sur la surface de son derme,
la sienne repart pour accrocher avec son index le collier lustré qui faisait la fierté de cet étrange animal doté d’une insolence qu’elle avouait, bien aimer ;

le jugement n’avait cessé de moduler tout au long de leur échange, d’un côté ou d’un autre ; et c’est toujours les yeux plantés dans les siens qu’elle le rapproche à son tour
minimisant la proximité
à des centimètres qui auraient pu se compter sur une seule main ;

elle ancrait l’attention de cet invité d’honneur sur sa splendeur avec le symbole-même de la décadence ambiante.

oh, ce serait une bêtise certaine.

d’une menace ou d’un sarcasme, elle lui laissait le soin d’un choix
car irène aime voir ces ouailles partir à contre-sens.

vous me rappelez mon animal préféré.

l’acidité de la framboise pouvait presque titiller les narines de quincy au travers de ses paroles ;
et les murmures s’élèvent autour face à ce spectacle qui aurait pu être inquiétant
lorsque l’intouchable irène brisait elle-même cette norme officieuse, réécrivait un certain code en s’aguichant le faire-valoir d’un autre ;

mais elle ! en avait le droit car après tout
sa réalité gravitait autour de son bon-vouloir

et se cristallisait dans l’imminence périlleuse d’un tabou au tournant.