D’aucun vous dira que Lilibelle fait un petit peu partie de ces gens qu’on croise une fois et qu’on oublie difficilement. Que ce soit la crinière d’un rose flashy parfois gratinée de bleu ou l’attitude espiègle mais dénuée de la moindre méchanceté, Lily laisse une impression sur son chemin et elle est rarement teintée de négatif. Elle fait preuve de bonne volonté, d’un sourire qu’il reste difficile à effacer de son visage et d’une énergie presque brillante de bonne humeur. A croire que rien ne peut l’abattre, que rien ne peut atténuer sa gaieté et que rien n’est un jour venu entraver sa route.

Dans les faits, Lily a grandit dans un petit village situé entre Arsinoë et le Bayou, une zone où ses parents tentaient tant bien que mal de cultiver et d’en gagner leur vie tout en permettant à leur fille d’expérimenter la vie au grand air, au contact des pokémons, loin du bruit et de la multitude des grandes villes. Lily n’était pas encore née que le Grand Cataclysme frappait déjà de plein fouet mais ses parents persistèrent, déterminés… et convaincus que l’Empire leur viendrait en aide. C'est en grandissant qu'elle y fera la connaissance de Gwen Knight, de 6 ans son aînée, habitante d’Arsinoë mais avec un intérêt commun pour le soin et prendre soin des autres.

Les bons souvenirs sont nombreux mais les mauvais tout autant et Lily se souvient encore des heures passées cachée sous la table en bois massif de la cuisine, les mains sur la tête, à trembler pendant que les éléments se déchaînaient à l’extérieur, arrachant les volets et une partie de l’encadrement de la fenêtre du salon. Un tonnerre un rien trop fort et vous la verrez perdre son sourire, sa bonne humeur et probablement une grande partie de son courage avec un regard terrifié à la recherche de l’abri le plus proche. Elle se souvient des pokémons disparus au grand désespoir de ses parents et du déchirement aussi bien émotionnel que financier, de l’accablement croissant qui se posait comme une chape de plomb, alourdissant l’air, éteignant les yeux et étouffant l’espoir.  

La question était dans l'air, pesante, muette. Jamais soufflée, jamais prononcée mais elle aurait pu être hurlée que ça n'aurait fait aucune différence.

Quand ?

Quand viendrait l’Empire ?

Sûrement l’Impératrice allait intervenir, sûrement l’aide était en chemin… mais le silence radio s’appesantissait.

C’est en 2005 que la lumière se fit dans leur coeur, eux qui ne pouvaient se résoudre à abandonner leur exploitation. L’aide était en chemin, la radio en parlait mais pas seulement ! L’aide ne vint pas de l’Empire mais de la République de Paldera et qu’elle soit trois fois bénie ! Le soulagement, cependant, fut de courte durée. La République mit quelques temps à se frayer un chemin jusqu’à la petite exploitation fermière qui tenait tant bien que mal malgré les affres de la météo. Une pluie de grêles grosses comme des pokeballs devança l’aide inespérée. Ce qu’il restait du toit se vit percé de part en part, les outils écrasés, brisés, les pokémons éparpillés, les cultures réduites à néant et les parents de Lilibelle n’eurent d’autre choix que de se résoudre à rejoindre la grande ville. Arsinoë vit arriver un triste lot de survivants.

Ils avaient tout perdu mais au moins gardaient-ils la main de l'autre serrée fermement dans la leur. La famille était en vie, ils pouvait encore avancer, il restait un espoir. Mais comment allaient-ils faire ?

Sa mère devint pâtissière et boulangère avec l’aide d’un Pâtachiot adopté alors en piteux état mais plein de bonne volonté. Son père… son père à ce jour cherche encore sa voie mais travaille à droite à gauche, déterminé à rester actif sans toutefois réussir à trouver une nouvelle passion pour remplacer celle perdue dans la bagarre contre les éléments déchaînés.
Et Lilibelle… Lilibelle resta fermement à leurs côtés, travaillant d’arrache-pieds, donnant un coup de coude à son père lorsque sa mère perdait espoir, pinçant sa mère à l’occasion pour voler un bout de pâtisserie, généralement gardant un sourire sur le visage de son entourage.

Mais jamais elle n’oublia.

Elle n’oublia pas le regard désespéré de son père sondant l’horizon pour voir arriver l’aide tant attendue de l’Empire, en vain. Elle n’oublia pas les tremblements à peine réprimés de sa mère qui lui serrait la main à lui en briser les doigts lorsque le vent se levait un rien trop fort, l’angoisse d’un nouvel épisode climatique et de ses conséquences pesant de tout son poids sur le peu qui leur restait.
Elle se rappellera toujours le corps de sa mère pressé contre le sien, enroulé autour d’elle pour la protéger de tout et celui de son père couvrant elles deux, ses bras forts faisant de son mieux pour les tenir au plus proche, au plus sûr tandis que leur caninos geignait, pelotonné contre eux, terrifié.

En 2013, elle rejoindra l’école de médecine Pokemon et y retrouvera Gwen pendant quelques années. Plus intéressée par le soin aux pokémons, Lily fera néanmoins en sorte de savoir comment soigner l’être humain… mais avec moins de zèle, un rien moins d’intérêt. Plus par mauvaise tête que par réelle malice, dans les faits elle a de bonnes notes, elle sait très bien soigner… elle boude, juste, et cela tourna rapidement en blague parmi ses camarades. Des blagues auxquelles elle se joignit sans réserve, le rire au bord des lèvres et la moquerie facile, les coups de coudes et la moue prête à déclencher l’hilarité générale. Elle quittera l’école avec beaucoup de câlins, beaucoup de pleurs et de rires humides, des promesses de se retrouver autour d’un café.

Elle a une dent contre l’Empire (et pas des moindres) mais elle ne s’exprime pas trop sur le sujet, se contentant de rejoindre les mouvements pacifiques du Mouvement de libération de Callero, surveillant sans montrer trop d’intérêt les actions de l’Armée révolutionnaire. Le tout, c’est de ne pas trop faire de vague, de ne pas se faire remarquer, de rester dans les marges. Elle est jolie, elle est gentille et enthousiasme, elle est pétillante et pleine de bonne humeur, prompte à apporter son aide sans se plaindre. Personne n’y regardera à deux fois et elle n’a guère l’intention de leur donner de bonne raison de s’attarder sur elle. Elle attend le bon moment, et elle saura se préserver jusqu’à le saisir lorsqu’il se présentera.
C’est sous la forme d’une femme au corvaillus en piteux état dans des circonstances plus que douteuses qu'il fit son apparition. Elle apporta son aide, sécurisa les lieux autant que faire se pouvait avec l’aide d’Ivy tandis qu’elle soignait le Pokémon blessé, s’appuyant sur les compétences de Poppy - au regard prudent pour ne pas dire méfiant à l’attention de celle qui se présentera plus tard sous le nom d'Isana - et de ses propres connaissances. Plus tard, Isana fera une nouvelle apparition, puis une autre, dans le but de la convaincre d’apporter son aide aux Révolutionnaires dont les pokémons étaient en piteux état.

La réponse fut claire : évidemment.

Tant qu’elle préservait son apparente neutralité en tout cas.